Cheminer sur les traces des carriers… les sabots râpés
1.8km
1h
Moyen
En boucle
A la découverte du sentier des carriers en 10 stations
Ancien carrier à Erquy, Augustin vous invite à découvrir les paysages façonnés par la main de l’homme depuis le XIXe siècle : une balade pour mieux connaître l’histoire du grès et des hommes surnommés dans les carrières « les sabots râpés ».
Points d’intérêts
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1 Le lac bleu
L’exploitation artisanale des carrières de la garenne d’Erquy commence à la fin du XVIIIe siècle avec la famille Le Doledec. Elle tire avec difficulté une pierre au grain fin, se prêtant à la taille, appelée « granit ».Les premières carrières sont ouvertes vers la fin du Premier Empire, alors que la garenne appartient à l’Etat français. ces carrières familiales sont exploitées par des maçons, originaires de Caroual.La famille Cholet exploite la dangereuse carrière du Pendu, Pierre Dayot celle autour du rocher du Sémaphore, Jean Rault la carrière le Gentil et Doledec, celle du Petit Port.En 1848, un entrepreneur de Saint-Servan, Claude Jouanne, obtient du préfet l’autorisation d’ouvrir la carrière du Maupas (aujourd’hui Lac bleu).
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2 Une vie rythmée par les carrières
Témoignage d’un ancien carrierles ouvriers pouvaient travailler jusqu’à 11 heures par jour, suivant la longueur de la journée, mais cela dépendait de la saison. En hiver, on commençait avec le jour et on finissait avec la nuit. En été, mes journées étaient plus longues et plus variées. A la saison des moissons, avant de partir à la carrière, je fauchais le champ d’un voisin, à la faux évidemment, et je terminais mon travail au retour de la carrière. cela me permettait de gagner plus d’argent car à l’époque, le salaire d’un ouvrier agricole était à peu près identique à celui d’un carrier. Je doublais donc le salaire de ma journée.
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3 L’organisation au sein de la carrière
A la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, les carrières employaient jusqu’à 200 ouvriers. L’activité au sein de la carrière s’organisait autour de différents corps de métiers : le contremaître, l’extracteur ou mineur, le coupeur de pierre, le tailleur de pierre, le manœuvre, le forgeron et l’apprenti.
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4 Des marins carriers
De nombreuses familles d’Erquy vivaient de la grande pêche à la morue, vers Terre-Neuve puis « à Islande ». A leur retour, à l’automne, les hommes allaient travailler dans les champs et dans les carrières comme manœuvres. Erquy, une position littorale privilégiée : A partir de 1950-1960, la découverte des gisements de praires et de coquilles Saint-Jacques entraînent une nouvelle vocation de pêche artisanale. Erquy est aujourd’hui devenu le premier port de pêche à la coquille Saint-Jacques des Côtes d’Armor.
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5 L’extraction dans la falaise
L’extraction consistait à percer verticalement, tous les 20cm, la roche avec une barre à mine ou un chante-perce. Le trou, qui pouvait atteindre jusqu’à 1m de fond, était chargé de poudre noire. L’explosion entraînait de décrochement d’un bloc de roche.La manutention était considérable : sorti à la main à l’aide de crics, de madriers ou d’une chèvre, le bloc de grès était ensuite déplacé sur des rondins en bois. Le plus souvent extrait en hauteur sur le front de taille, il fallait parfois une journée de travail à trois ouvriers pour le descendre sur le plat (le carreau), où il était possible ensuite de le faire rouler.
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6 Des conditions de travail difficiles
En plus des accidents fréquents, les ouvriers travaillaient dans un nuage de poussière sans savoir qu’ils risquaient la silicose (maladie pulmonaire due aux poussières de silice qui pénètrent dans les voies respiratoires puis se collent aux bronches et se transforment en ciment).Les carriers étaient tous équipés de sabots cloutés pour limiter l’usure et protéger leurs pieds. Le bruit des sabots aux talons usés était reconnaissable lorsqu’ils descendaient de Tu Es Roc (rue des Terre-Neuvas)…
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7 Le taillandier
Ce bâtiment, qui date probablement du XIXe siècle, abritait la forge de la carrière. Un ouvrier avait besoin de deux brouettes de burins par semaine pour assurer son travail. Aussi tous les deux jours environ, le tailleur également forgeron, reforgeait ses outils sur l’enclume. La forge comportait un foyer et un soufflet qui permettaient d’attiser le feu et ainsi d’augmenter la température du charbon. Le forgeron faisait rougir le fer qu’il tenait entre ses pinces pour ensuite le battre sur l’enclume avec différents marteaux. Il lui donnait la forme souhaitée au moyen d’une étampe. La pièce terminée, encore chaude, était trempée (chauffée rouge vif, puis plongée dans l’eau froide pour refroidir rapidement le fer et donc durcir la pièce forgée).
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8 Les effileurs de grès
Un baquet de sable en guise d’établi.Le demi-fût taillé en baquet et rempli de sable faisait office d’établi pour limiter la pénibilité du travail. Il permettait de caler le pavé pour mieux travailler et limiter le rebond en absorbant une partie du choc de l’outil sur la pierre.Les salaires étaient très différents chez les tailleurs de pierre qui étaient payés à la tâche. Certains gagnaient deux fois plus que les autres, mais certains d’entre eux dépensaient plus que les autres. Un tailleur était payé 10 centimes le pavé (c’était le mieux rémunéré).
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9 L’exportation des pavés
En 1906, la production de pavés atteint environ 90 000 tonnes. On en compte 850 000 en 1910. Mais les pavés, taillés sur place, ne sont pas la seule production des carrières. S’y ajoutent aussi les moëllons, les bordures de trottoirs, les linteaux et montants pour portes et fenêtres. À cette époque, la main d’œuvre afflue de la Bretagne intérieure ainsi que de l’Italie, de l’Espagne, du Portugal. Cet essor démographique sans précédent impose la construction de logements ouvriers familiaux.
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10 Les déchets de taille
Aujourd’hui les techniques actuelles, avec l’usage de cliveuses, permettent d’obtenir un rendement élevé et beaucoup moins de déchets (20% de déchets aujourd’hui contre 80% autrefois).Cependant, le travail de la pierre s’effectue encore de façon manuelle pour obtenir une belle finition (ou avec l’outil pneumatique).L’activité des carrières fut à son apogée entre 1900 et 1927, puis la production s’affaiblit progressivement, victime de la concurrence et du manque de mécanisation.Les carrières industrielles entraînent la fermeture de la carrière du Maupas (lacs bleus) en 1914 et de l’exploitation de la fosse Eyrand au début des années 1960.